Ivo de Lessinis

Diverticulum

Vicq

Fresnes-sur-Escaut

Quatrain 8 : Vicq

1559.5
Avril
Roy Salve Victeur Imperateur
La foy faussée le Royal fait cogneu
Sang, Mathien Roy fait superateur
De gent superbe humble par pleurs venu

Le dénomination ancienne du village était "vy" ou "vi", provenant du latin "vicus" signifiant "bourg" ou "village".

Autrefois confondu avec Escaupont dans une même paroisse, Vicq se situait dans une vaste zone marécareuse sur la rive droite de l'Escaut. Il était séparé d'Escautpont et de Fresnes par le cours de l'Escaut, et de Crespin par la Forêt d'Emblise. Le passage de la chaussée romaine à proximité de Vicq accrédite la présence, d'une "villa" donnée à l'Abbaye de Saint-Amand par Charles le Chauve en 847. Le parcours de la chaussée était interrompu par le cours de l'Escaut. un passage à gué pouvoir convenir pour les chevaux et les attelages, mais les voyageurs pouvaient également franchir le fleuve par un pont qui se trouve à l'origine de l'existence et de la dénomination d'Escautpont. Ainsi cette localité est-elle indiquée sur les anciennes cartes romaines par sa dénomination latine : "Pons Scaldis".

En 881, une expédition de Régnier au Long Col, Comte de Hainaut, contre Rollon, un chef viking, conduisit à une bataille sanglante à la lisière des marais de Vicq, où les troupes hennuyères subirent une défait. Régnier au Long Col fut fait prisonnier. Il fut libéré grâce au dévouement de son épouse, Albrade et à la magnanimité de son adversaire, mais les Normands passèrent une accord avec Charles le Gros : ils restèrent à Condé jusqu'en 889 et continuèrent à ravager le Hainaut, l'Artois et la Picardie, pour aller ensuite s'établir à Louvain.

En 1175, un règlement d'avouerie cite le Village de Vicq.  Gilles de Vicq en devint le seigneur en 1236. Escaupont n'en fut détaché qu'en 1265.

Vers 1

Roy : Régnier au long col
Salvé : Saint Saulve, martyr chrétien

Victeur : En latin, "Victor" désigne le vainqueur dans une guerre, tandis que "Victoria" est la victoire remportée sur quelqu'un. (Gaffiot)En l'occurrence, c'est la victoire de Rollon sur Regnier.

Vicq : confondu au 12ème siècle avec Escaupont ("Vi et Escaupons", disent des documents anciens)

Impérateur : En latin "imperator" désingue un chef d'armée; c'est le titre décerné au général victorieux (Gaffiot).

Vers 2

La foy faussée : La fausse foi, ce qui désigne les incroyants et les idolâtres

Le Royal fait cogneu : Le fait connu attribué à Régnier au Long Col

Vers 3

Sang : Verser le sang, c'est, sur un plan individuel, tuer quelqu'un, et, sur un plan collectif, faire la guerre

Mathien : Matthieu, qui est le prénom d'un des douze apôtres

Prix de la rançon : 12 otages

Roy fait : Régnier au Long Col
supérateur : C'est le nom attribué au personnage, dont l'identité réelle n'était sans doute pas connue, qui avait été martyrisé en même temps que Saint Saulve et dont le corps avait enterré au-dessus du sien, d'où leur association pour le culte des reliques.

Vers 4

De gent : Gand, lieu de retraite des Normands sur l'Escaut

Superbe et humble : Alberade, épouse de Régnier au Long Col, qui, avec fierté et humilité est venue demander la liberté de son époux et payer la rançon

par pleurs venus : éplorée, à cause de son chagrin

Regnier au Long Col, Comte de Hainaut

Hrolf ou Rollon, d'origine danoise, descendit avec ses hommes dans l'Ile de Wasda, en Frise où il devient la terreur du pays. Opprimés par des dévastations continuelles, les malheureux insulaires appelèrent à leur secours les princes voisins. Le généreux Regnier au Long Col, qui était alors comte du Hainaut, province qui comprenait une grande portion de la Hesbaye et d'autres terres voisines, se joignit à Radbod, chef des Frisons pour chasser les Normands de l'île de Zéeland. Mais Rollon les défait en un seul combat, livre l'île aux flammes, puis cingle vers la Frise qu'il soumet et dévaste. Au printemps de l'année suivante, il se répand dans le Hainaut ravageant les bourgs et les monastères de l'Escaut à la Sambre. Les Normands s'y gorgèrent d'or et de sang. (…) A cette terrible apparition Regnier tenta un nouvel effort. Ayant réuni ses forces à celles de Gozelin, abbé de Saint-Amand, et de François, Evêque de Liège, il vint attaquer les barbares à Condé. Mais la victoire favorise encore ces derniers, et Regnier lui-même fait prisonnier, rachète chèrement sa liberté. On rapporte qu'ayant cherché de prendre les Danois dans un piège, Regnier s'était emparé de 12 de leurs officiers; mais y étant tombé lui-même, il fut pris et amené au vainqueur. Alberade, son épouse, envoya des députés à Rollon, pour lui proposer de rendre son mari en échange de ses 12 officiers : "Non seulement, je ne rendrai pas à Albérade, celui qui lui est si cher, mais je le ferai pendre au vent si avant la nuit, mes officiers ne me sont rendus, et si l'on ne me livre tout l'or de la province et le dernier vase sacré servant au culte catholique (c'était surtout le clergé qui était l'objet de la haine des barbares…)". Albérade chérissait Regnier… sa tendresse arrêta le glaive du Normand, et Regnier lui fut rendu. Rollon de son côté, plein d'estime pour un si beau trait d'amour conjugal, refusa la rançon. Ainsi ce cœur barbare n'était point dépourvu de tout sentiment de générosité et de grandeur. (Alexandre-Guillaume Chotin, Histoire de Tournay et du Tournésis depuis les temps reculés jusqu'à nos jours, Tournai, 1840)

Rollon alias Robert le Diable ou Robert le Frison

En 912, Charles le Simple donne à Rollon la main de sa fille, Gisèle, avec pour dot cette belle partie de la Neustrie qui fut appelée Normandie. Pour condition, il imposa à Rollon d'embrasser le christianisme. Le prince normand se fit baptiser et reçut le nom de Robert; mais les peuples dont il avait été longtemps la terreur lui conservèrent celui de Robert le Diable ou Robert le Frison.

Saint-Saulve

Une peinture ancienne, sans doute du 17ème siècle, qui appartenait autrefois à l'Abbaye de Saint-Saulve, représente la translation des reliques de ce personnage. L'éminent chanoine Platelle a relaté, dans le Tome VII des Mémoires du Cercle archéologique et historique de Valenciennes (1971), la légende qui vaut à la ville, en dépit de la fantaisiste tentative  de l'époque révolutionnaire qui voulut l'appeler Brena, de porter encore aujourd'hui le nom du saint. Une légende vaut à la ville de porter encore aujourd'hui le nom de Saint Saulve.

Saint. Saulve était, sous Charles Martel, au 8ème siècle, un évêque missionnaire probablement originaire d'Auvergne, venu à Valenciennes alors centre du fisc. Invité à un repas par un administrateur du fisc du nom de Gerardus, il excita, en raison de la grande richesse de ses ornements et vases sacrés, la convoitise de Winegardus, fils de Gerardus. Celui-ci l'entraîna dans un guet apens et le fit jeter en prison avant de commander à un de ses serviteurs de le mettre à mort avec son compagnon. Il fit ensuite enterrer les corps, Saulve en dessous, l'autre, de ce fait nommé Superius, au dessus, dans une étable située à Brevetica, notre Beuvrages actuel. Un taureau protégea cette sépulture en écartant  à coups de sabots et de cornes toute vache qui approchait. Une femme du village vit une nuit deux lampes ardentes fixées aux cornes du taureau. Elle rapporta la chose aux prêtres. Charles Martel, averti en songe, ordonna une enquête sur la disparition de l'Evêque. Très vite les coupables furent découverts. On leur creva les yeux. Restait à donner aux saints martyrs une sépulture décente. Leurs dépouilles, chargées sur un chariot traîné par des bœufs, devaient gagner l'église de Saint-Vaast à Valenciennes, puis  Sainte-Pharaïlde à Bruay. Peine perdue: les bœufs refusaient chaque fois  d'avancer. On les laissa aller et ils se rendirent en l'église Saint-Martin où Saulve avait dit la messe et prié. Une communauté de chanoines fut créée pour desservir le sanctuaire où reposaient les reliques du saint. Elle devint par la suite l'Abbaye de Saint-Saulve.

(Jean-Claude Poinsignon, document de la ville de Saint Saulve)

Vicq

Autrefois, Vicq et Escautpont faisaient partie d'une même entité territoriale : une paroisse. Au 13ème siècle, Vicq et Escaupont relevaient d'une même seigneurie ; s'y appliquaient les coutumes consignées dans la « loi de Vi et Escaupons ».

En 921, ces terres appartenait à l’Abbaye de Saint-Amand. A la fin du 12ème siècle, le domaine passé sous l’autorité de l’Abbaye de Mortagne, installée à proximité du château qui défendait le Confluent de l'Escaut et de la Scarpe, entre les deux cours d'eau, à l'emplacement de la commune actuelle de Château-l'Abbaye.

L'étymologie de Vicq proviendrait du latin « vicus », qui signifie « village » ou « bourg », c'est-à-dire un lieu habité. Cette appellation qui était généralement attribuée à de petites agglomérations qui apparaissaient à l’époque gallo-romaine, pour la plupart en bordure des chaussées romaines, qui constituaient les première zones d'exploitation agricole, où des terres étaient attribuées aux vétérans de la légion.

Toute la région était boisée et difficile à défricher. C'était toujours le cas à l'époque mérovingienne et c'est précisément ce qui avait justifié les donations à différentes communautés religieuses, notamment par Dagobert à Saint Amand, qui avait déjà construit plusieurs églises et fondé divers monastères, à proximité d'une source thermale, bien que l'authenticité de la charte concernant la fondation de l'Abbaye d'Elnon paraisse discutable pour les historiens, malgré sa confirmation par l'autorité pontificale de Martin Ier.

Au début de la conquête de la Gaule par les Romains, la voie romaine venant de Bavay empruntait le tracé d'une piste gauloise qui franchissait l'Escaut par un pont. L'importance de cette localité, dénommée « Scaldis Pons », tirait son importance de sa position stratégique au carrefour des principales routes qui traversaient la Nervie. Il en subsiste l'actuelle « Chaussée Brunehaut » qui suit approximativement le tracé de cette voie en traversant la partie orientale de la Forêt de Raismes, avant de franchir la Scarpe entre les communes actuelles de Château-l'Abbaye et Nivelle.

Le pont sur l'Escaut, édifié par les Romains, était gardé par les légionnaires vétérans qui ont été les premiers exploitants agricoles. L'invasion des Francs au 5ème siècle n'a pas effacé le traces de cette civilisation. Succédant aux Mérovingiens, les Carolingiens, ont concédé les terres avoisinantes à divers monastères, dont l'Abbaye de Saint-Amand.

Escautpont

Le centre du village d'Escautpont s'est déplacé plusieurs fois. D'abord localisé près du pont romain, il s'est ensuite fixé sur la rive droite de l'ancien lit de l'Escaut, autour de la précédente église, qui s'élevait au bout de l'actuelle Rue du Vieux Cimetière, à proximité du lieu-dit le «Pas de l'Ayau», qui a constitué le pôle de développement jusqu'au début du 19ème siècle, suite au déplacement du lieu de franchissement de l'Escaut. Toutefois, sur la rive gauche du fleuve subsistait la zone de défrichage du Hameau des Trieux, à l'orée de la forêt, à proximité de l'ancienne voie romaine, qui continuait à servir de route principale. La plus grande partie de ce hameau a été séparée de Fresnes-sur-Escaut pour être rattachée à Escautpont en 1841.

Au cours du 19ème siècle, l'implantation de verreries et de brasseries a engendré un accroissement de la population. Le centre du village s'est déplaçé à nouveau sur la rive gauche. La vieille église, exigüe et délabrée, a été rasée après l'inauguration de la nouvelle, en 1875, également consacrée à Saint Amand.

Par la suite, l'exploitation du charbon a provoqué un extraordinaire accroissement de la population et favorisé l'émergence de nouveaux quartiers : Cité Lagrange, Cité Nouvelle, Cité Brunehaut et Trieu-Saint-Jean.

Les armoiries d'Escautpont sont représentées par un pont maçonné à trois arches et le sigle S.P.Q.R (Senatus Populus Que Romanus : le sénat et le peuple romain). Cette formule officielle désignait l'Empire Romain. Une gerbes de blé et une ruche rappellent la vocation initialement agricole du village.